Avant que les super-héros ne prennent définitivement le contrôle des comics Marvel, il y avait autre chose. Des créatures étranges. Des colosses intergalactiques. Des monstres à antennes et à écailles, aux noms qui claquent comme des onomatopées : Fin Fang Foom, Sporr, Blip …
Créés dans les pages de Tales to Astonish, Strange Tales, ou Tales of suspense,, ces monstres étaient les stars d’une époque où Marvel expérimentait, tentait, bousculait. On les pensait oubliés, enterrés dans les cavernes poussiéreuses du Silver Age.
Et puis… Red Richards est arrivé.
Dans la mini-série Fantastic Four: World's Greatest Comics Magazine, proposée récemment, ce vibrant hommage au style de Kirby et de Lee, ces créatures sont mystérieusement ramenées à la vie par Mr Fantastic lui-même. Objectif ? Les retourner contre le plus grand esprit maléfique de leur temps : Victor von Fatalis ! Oui, c’est aussi fou que ça en a l’air.
Dans ce billet, je vous propose de (re)découvrir ces monstres atypiques, entre analyse rétro et retour en grâce inattendu. Qui étaient-ils à leur création ? Que sont-ils devenus dans cette relecture hommage ? Et surtout… pourquoi Marvel les a-t-il ramenés du néant ?
C'est parti !
L'Amibe géante !
Créé par : Jack Kirby (dessin), Dick Ayers (encrage), Stan Lee (scénario présumé)
Première apparition : Tales of Suspense #11 (Septembre 1960)
Le pitch d’origine
Quelque part dans un laboratoire isolé, un scientifique ambitieux croit pouvoir créer la vie. Ce qu’il obtient, c’est SPORR, une amibe mutante devenue gigantesque, dotée d’un œil unique et d’un appétit insatiable pour l’asservissement de l’humanité ! Lentement, inexorablement, Sporr rampe hors des ténèbres, engloutissant les faibles esprits sur son passage. Sa volonté ? Dominer les hommes. Son cri de guerre ? Eh bien… une sorte de silence gluant et maléfique. Heureusement, un héros solitaire se dresse entre l’humanité et la bestiole.
Contexte éditorial
À cette époque, Marvel (encore Atlas Comics) publie une multitude de récits courts dans des anthologies comme Tales of Suspense, Strange Tales ou Journey into Mystery. Le ton est un mélange de science-fiction paranoïaque, d’horreur morale et de twists à la Twilight Zone. Les monstres géants dessinés par Kirby – avec souvent Ayers à l’encrage – pullulent : Fin Fang Foom, Groot, Goom, et bien sûr, Sporr. Ce ne sont pas encore des super-vilains, mais plutôt des forces de la nature, symboles de la peur nucléaire ou de la science qui dérape. Le nom même – SPORR – est typique de ces créatures à la sonorité gutturale et extraterrestre.
Le retour dans Fantastic Four: World’s Greatest Comics Magazine #12 (2001)
Red Richards, dans un ultime baroud d’honneur contre le mal absolu – Fatalis – convoque des créatures oubliées, sorties tout droit des légendes pulp de l’univers Marvel. Comment ? Par un procédé pseudo-scientifique digne des meilleurs technoblablas de l’époque : un résonateur extradimensionnel récupère des entités "archétypales" enfouies dans le subconscient collectif de l’humanité. Rien que ça.
SPORR est ainsi ressuscité pour rejoindre une task force de monstres géants, dirigée contre le tyran de Latvérie. Il ne parle pas (ça ferait bizarre), mais obéit à la volonté de Richards comme une arme semi-contrôlée. Sa présence apporte un effet visuel spectaculaire, tout en rendant hommage aux racines "weird science" de l’univers Marvel.
Anecdote ou fun fact
SPORR n’a quasiment jamais été réutilisé dans les décennies suivantes, à part quelques clins d’œil ici ou là (notamment dans Marvel Monsters: From the Files of Ulysses Bloodstone). Fait cocasse : son nom a parfois été confondu avec celui d’un champignon mutant dans des jeux vidéo japonais. En VF, il a peut-être été publié dans les traductions Arédit/Artima des années 70, mais sous un autre nom, ou noyé dans une anthologie. Il fait partie de ces monstres "oubliés mais immortels", que les fans adorent retrouver.
alias Shzzzllzzzthzz… mais appelons-le Blip, hein
Créé par : Jack Kirby (dessin), Dick Ayers (encrage), Stan Lee (scénario présumé)
Première apparition : Tales to Astonish #15 (Janvier 1961)
Le pitch d’origine
Une nuit comme les autres, un radar capte un signal étrange venu des confins de l’espace. Et bientôt, il atterrit : BLIP, un robot extraterrestre géant, au design à la fois cubique, menaçant, et un poil maladroit. Sa mission ? Évaluer les capacités défensives de la Terre. Sa méthode ? Écraser tout sur son passage avec des bras démesurés et une démarche de bulldozer. Mais attention : Blip n’est pas qu’un tas de ferraille belliqueux… Il a une conscience, et il est même capable de remords. Car dans un twist typique des années 60, l’humanité prouve qu’elle mérite peut-être… de survivre !
Contexte éditorial
Tales to Astonish faisait partie de ces revues anthologiques où les histoires de monstres géants, de savants fous et d’invasions aliens se succédaient à un rythme effréné. Kirby y déchaîne sa créativité en recyclant et amplifiant les tropes de la SF classique : robots géants, civilisations galactiques, et dilemmes moraux simplifiés. Blip, comme beaucoup de ses congénères, est plus qu’un simple vilain : c’est une créature test, envoyée pour jauger le courage ou la moralité des humains. Ce sont des récits à la fois naïfs et puissants, bourrés d’énergie visuelle, portés par un Kirby au sommet de son art graphique "pré-super-héros".
Le retour dans Fantastic Four: World’s Greatest Comics Magazine #12 (2001)
Revenu d’entre les cases poussiéreuses des vieilles revues, Blip est invoqué par Mister Fantastic avec les autres monstres légendaires, pour former une sorte de "Ligue des Colosses" contre Fatalis.
Avec sa carcasse métallique et son design rétro-futuriste, il incarne l’âge atomique des débuts Marvel. Dans le récit, il reste muet, mais visiblement programmé pour obéir à Red Richards – une obéissance qu’on sent teintée d’une conscience ancienne, comme s’il se souvenait que les humains méritaient d’être aidés. Il joue le rôle du "muscle mécanique", pilonnant les défenses de Fatalis.
Anecdote ou fun fact
BLIP a fait partie des quelques monstres à réapparaître dans des encyclopédies Marvel, souvent comme curiosité historique. Il a brièvement été mentionné dans Marvel Monsters ou Marvel Legacy: The 1960s Handbook. Son nom imprononçable – Shzzzllzzzthzz – est une blague récurrente parmi les fans des monstres Marvel. En France, aucune preuve formelle de sa publication dans les années 60-70 n’a été trouvée, mais il pourrait avoir figuré dans un obscur Etranges Aventures ou Névrose Arédit, sous un nom comme "Robotus" ou "Le Monstre d’Acier"…
Créé par : Jack Kirby (dessin), Dick Ayers (encrage), Stan Lee (scénario présumé)
Première apparition : Tales of Suspense #14 (Février 1961)
Le pitch d’origine
À Hollywood, un sculpteur de décors fabrique une gigantesque statue d’alien pour un film de science-fiction. Jusque-là, rien d’anormal. Sauf que cette statue devient vivante après qu’un esprit extraterrestre s’y soit réfugié ! Le golem de pierre, baptisé It, se met alors à tout piétiner sur son passage, tel un Godzilla en grès animé par des intentions pas très nettes.
Mais, plot twist typique de l’époque : le colosse n’est pas maléfique en soi. Tout dépend de qui contrôle la bête… car oui, It peut être possédé par un esprit humain, et dans de futures histoires, c’est ce qui lui arrivera. Une statue de cinéma qui devient un vrai super-héros ? Welcome to Marvel avant les super-héros.
Contexte éditorial
La première histoire d’It appartient à la veine "monstre-gimmick" chère à Kirby. La différence ici, c’est qu’It deviendra un véritable personnage récurrent, chose rare pour un monstre d’anthologie. Dans les années 70, il revient dans Astonishing Tales #21 à #24, cette fois possédé par un scénariste de comics paralysé, Bob O’Bryan, qui utilise le colosse pour devenir… un super-héros géant !
On touche ici à une forme de proto-Méta-Marvel, mélangeant le monde du cinéma, le handicap, et le monstre de pierre géant qui défend la veuve et l’orphelin.
C’est donc un symbole touchant, loin du simple freak destructeur.
Le retour dans Fantastic Four: World’s Greatest Comics Magazine #12 (2001)
Quand Red Richards active son "invocateur de monstres oubliés", It surgit avec fracas, fidèle à sa légende de géant de pierre. Il incarne ici la puissance brute et la détermination muette, obéissant aux ordres de Richards comme une arme sacrée sortie du passé. Pas un mot, pas une hésitation : il fonce sur les forces de Fatalis comme un bulldozer mystique. Pas sûr que ce soit Bob O’Bryan aux commandes, mais le Colosse semble animé d’un instinct protecteur... et d’un sérieux goût pour le démolissage.
Anecdote ou fun fact
It est l’un des rares monstres Marvel pré-super-héros à avoir eu sa propre mini-série dans les 70’s. Un fait rare, presque unique pour ces créatures. Et puis franchement… une statue de film qui devient un super-héros, c’est du Stan Lee pur jus : à la fois absurde, génial, et émouvant.
Créé par Stan Lee & Jack Kirby
Première apparition : Strange Tales #89 (juillet 1961)
Le pitch d’origine
Dans Fin Fang Foom !, un jeune historien taïwanais traverse la mer de Chine pour rejoindre la Chine continentale. Son but : réveiller un dragon extraterrestre millénaire qui dort dans une grotte, afin de saboter une invasion communiste imminente. Oui, c’est exactement aussi étrange que ça en a l’air. Il réussit à réveiller Fin Fang Foom, une créature immense, écailleuse, aux yeux brillants, douée de parole, et extrêmement en colère. Il le manipule pour qu’il détruise la flotte ennemie, avant de le ramener dans sa caverne, où il retrouve son sommeil mystique.
Contexte éditorial
Fin Fang Foom est clairement inspiré des récits orientalisants et des films de monstres géants à la Godzilla, mélangés à une touche d’absurde made in Marvel. Son nom même est une onomatopée volontairement ridicule — que Stan Lee a inventée pour être inoubliable (mission réussie).
Contrairement à beaucoup de ses congénères, Fin Fang Foom a survécu dans l’imaginaire Marvel. Son design a été modernisé, mais il est resté fidèle à sa première version : un dragon alien, aussi majestueux que redoutable.
Son retour dans World’s Greatest Comics Magazine (2001)
Dans cette mini-série, Fin Fang Foom est ramené dans le monde des vivants par Red Richards, aux côtés d'autres monstres d'antan. Dans cette version, il ne s’agit plus d’un protecteur ou d’un dragon mystique manipulé par un jeune héros, mais d’un colosse d’énergie destructrice, déployé contre le Docteur Fatalis. Son charisme et sa puissance en font un élément central de cette “armée de monstres” ; impossible de passer à côté. Il symbolise la force brute de l’âge d’or Marvel, mais aussi sa flamboyance visuelle.
Anecdote / Héritage
Fin Fang Foom a connu une seconde vie bien au-delà de son statut de "monstre du mois". Il a affronté Iron Man, Thor, Hulk, et même apparaissait dans des jeux vidéo (LEGO Marvel, Ultimate Alliance), des dessins animés, et plus récemment dans les comics modernes comme un personnage semi-sérieux, semi-parodique. Il a aussi été publié en France dans les années 80 dans Eclipso (Arédit), recadré en noir et blanc,
Conclusion : Les Monstres d'Hier, l'Écho d'Aujourd’hui
Avant que les super-héros ne prennent définitivement le pouvoir, l’univers Marvel était peuplé de créatures étranges, colosses radioactifs, dragons millénaires, et extraterrestres incompris. Ces êtres n’étaient pas là pour vendre des figurines ou sauver le monde, mais pour nous faire frissonner, rêver, et parfois réfléchir.
Aujourd’hui relégués aux marges de la continuité officielle ou ramenés à la vie pour un clin d’œil nostalgique, ils incarnent une époque où l’inconnu, la différence, et l’imagination pure étaient les véritables moteurs du récit.
Ce sont des mythes pulp, des fables de science-fiction déguisées en histoires de monstres, des archétypes qui n’ont rien perdu de leur charme, même 60 ans plus tard.
Leur retour dans Fantastic Four: World’s Greatest Comics Magazine n’est pas anodin : c’est un hommage vibrant à ce pan de l’histoire Marvel souvent ignoré, mais essentiel. Parce que derrière chaque super-héros, il y a eu, un jour, un monstre.
Et parfois, ce monstre... c’était déjà un héros....
En exclusivité mondiale, je vous propose les aventures de ces créatures oubliées, en français évidemment !!!
[SCANTRAD]
L'histoire de FIN FANG FOOM publié dans SIDERAL N°28
En complément, je vous propose "Marvel Monsters - Creatures of the Marvel Universe Explored" en VO. De quoi ça parle ?
Paru en juillet 2021, ce livre est un hommage grand format aux créatures étranges et merveilleuses qui peuplent l'univers Marvel depuis ses débuts.
Écrit par Kelly Knox et édité par DK Publishing, cet ouvrage visuel plonge dans l'histoire de ces monstres souvent oubliés, bien avant que les super-héros ne monopolisent les premières pages.
Au fil de ses 200 pages richement illustrées, le livre dresse le portrait de monstres classiques comme Fin Fang Foom, Groot ou Sporr, aux côtés de figures plus modernes comme Man-Thing ou les Marvel Zombies. Chaque créature bénéficie d’une fiche détaillée, entre anecdotes, apparitions marquantes et analyses de leurs pouvoirs. Plus qu'une simple encyclopédie, c'est une célébration de l'imagination débridée des comics des années 50-60, quand la peur de l'inconnu et les rêves de conquêtes cosmiques donnaient naissance à des créatures aussi fantastiques que terrifiantes. Un indispensable pour tous ceux qui veulent explorer une facette plus sauvage et méconnue de la Maison des Idées.
« Mes monstres étaient des monstres attachants. Je leur donnais des noms — certains étaient maléfiques, d'autres étaient bons. » JACK KIRBY
Qu'est-ce qui fait un monstre ?
Avant que Stan Lee et Jack Kirby, ne créent certains des plus grands super-héros du monde, ils faisaient des monstres. Leurs créations rugissaient et tempêtaient à travers les pages colorées des comics à 10 cents vendus dans les kiosques à journaux à travers le pays. Les récits étranges et stupéfiants de Lee et Kirby reflétaient les peurs et les espoirs des années 1960.
Les monstres naissaient d'accidents radioactifs sur fond de Guerre Froide, et des conquérants venus des étoiles déclaraient que la Terre leur appartenait, tandis que la course à l'espace battait son plein.
Au fil des années, d'autres créateurs Marvel façonnèrent leurs créatures selon les signes des temps. Pendant les années 1970 et 1980, des légendes comme les loups-garous et les vampires furent transformées en monstres modernes, tels que Werewolf By Night et Morbius the Living Vampire.
Les monstres devinrent aussi des anti-héros complexes et contemplatifs, notamment Hulk. À l'approche de la fin du XXᵉ siècle, l'idée d'une fin du monde s'était ancrée dans l'inconscient collectif, et, au nouveau millénaire, des monstres capables de provoquer l'Apocalypse furent inventés : Apocalypse Beast, Marvel Zombies, et Leviathon Mother faisaient tous partie d'une ère où tous les héros courageux et brillants devaient s'unir pour survivre.
Quelle que soit leur époque, les monstres Marvel brillèrent par leur étrangeté. Cette collection célèbre l'étrange et l'extraordinaire, ceux qui sortent de l'ombre avec un regard perçant — ceux qui, s'ils n'effraient pas les foules, les fascinent certainement. Ne détournez pas les yeux, même si la tentation est grande. Si vous vous demandez « pourquoi ? » ou « comment ? », vous êtes exactement là où vous devez être.
Et pour conclure, si le billet vous a plu, je vous préparerai un second opus..
A vous de me dire…
excellent, merci mon nanacho !
RépondreSupprimerTrop génial, fallait y penser ! Merci, Anacho !
RépondreSupprimerMoi ma nanacho c'est ma préférée, loin devant la Tartinette, ou la Calette HD !!!
SupprimerSnif, je vois très très loin à l'horizon, la silhouette d'Anacho à peine perceptible et entre nous un aviateur HD qui me cache cette silhouette musclée (quel bel homme !). MDR
Supprimeravec ses muscles saillants, ses pecs à la bière... hummm !
SupprimerPrécision pour le bel homme, qu'on ne se méprenne pas, je parlais d'Anacho, pas du Natacha HD creuseur de Piscine. LOL
Supprimer"Aviateur" c'est quoi ça ?...Ah oui ! Les gonfleurs d'hélices !... Moi j'ai une ancre m'sieur ! Et pour la piscine, j'ai trop creusé sans mes lunettes...J'ai débouché sur un fosse sceptique d'un voisin...Du coup j'ai deux piscines ! Yep !
SupprimerMERCI !
RépondreSupprimerMerci Beaucoup.
RépondreSupprimerMerci Anacho pour ce scantrad que je découvre.
RépondreSupprimerBravo, Merci, Fabuleux, du Bel Art Anacho
RépondreSupprimerMerci Anacho, superbe, des Monstres, du Fantastique, de la S.F., c'est cela Anacho, il me terrifie à chaque publication, sont univers est impitoyable, mais on adore ça, ENCORE Anacho, pour adoucir nos nuits blanches avec ces séries tout droit sorties de ton univers.
RépondreSupprimerBonjour et bon weekend. Merci Anacho.
RépondreSupprimerBonjour le club et grand merci Anacho. T'es vraiment un...monstre du PF !
RépondreSupprimerUn tout grand merci Anacho super fiche tu peux franchement lancer l'opus 2 et la suite éventuellement
RépondreSupprimerGrand merci Anacho pour ces découvertes
RépondreSupprimerMerci Anacho, trop génial vivement la suite
RépondreSupprimerMerci Anacho pour ce scantrad des Monstres Marvel,
RépondreSupprimercomics US des années 60 que l'ont retrouvaient un peu partout
dans les collections Arédit...
Merci Anacho pour cette découverte.
RépondreSupprimerSuperbe fiche...merci Anacho
RépondreSupprimerGénial, merci!
RépondreSupprimerGrand merci Anacho pour cette découverte.
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